A mi amiga Ana C.
A las 8:15 de la mañana de aquel 8 de agosto de 1945, hace hoy setenta años, el infierno se desató sobre la ciudad de Hiroshima, Japón, y sobre sus pobladores. Ni los que sufrieron la primera explosión de una bomba atómica sobre ellos, ni los que la lanzaron, quiero suponer que eran conscientes de lo que aquel hecho significaba. Durante toda la mañana he estado leyendo artículos y noticias sobre aquel instante de horror sin encontrar nada digno de refutar la frase de Voltaire de que "la verdad es una fruta que conviene cogerse muy madura", que pudiera aplicarse a lo ocurrido ese día. A mediodía, mi amiga Ana me envía desde Ámsterdam una reproducción de la página del diario francés Combat, fechada el 8 de julio de 1945, en el que se reproduce un artículo del filósofo Albert Camus sobre lo acaecido dos días antes en Hiroshima. Camus no podía saber lo que al día siguiente se iba a repetir sobre la ciudad de Nagasaki y sus pobladores.
No sé si la filosofía puede salvarnos del horror. No soy filósofo ni lo pretendo. Me quedo con la mera pretensión de comprender el mundo, como decía Hannah Arendt. Y estas palabras de Camus, que reproduzco en su texto original y en su traducción española, es lo más comprensible que he podido encontrar sobre lo ocurrido aquel 8 de agosto de 1945, a las 8:15 de la mañana, sobre la ciudad de Hiroshima y sus gentes. Sirva de homenaje y recuerdo a todas las víctimas inocentes de aquel día y de todas las guerras de la historia.
"Le monde est ce qu'il est, c'est-à-dire peu de chose. C'est ce que chacun sait depuis hier grâce au formidable concert que la radio, les journaux et les agences d'information viennent de déclencher au sujet de la bombe atomique.
On nous apprend, en effet, au milieu d'une foule de commentaires enthousiastes que n'importe quelle ville d'importance moyenne peut être totalement rasée par une bombe de la grosseur d'un ballon de football. Des journaux américains, anglais et français se répandent en dissertations élégantes sur l'avenir, le passé, les inventeurs, le coût, la vocation pacifique et les effets guerriers, les conséquences politiques et même le caractère indépendant de la bombe atomique. Nous nous résumerons en une phrase : la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l'utilisation intelligente des conquêtes scientifiques.
En attendant, il est permis de penser qu'il y a quelque indécence à célébrer ainsi une découverte, qui se met d'abord au service de la plus formidable rage de destruction dont l'homme ait fait preuve depuis des siècles. Que dans un monde livré à tous les déchirements de la violence, incapable d'aucun contrôle, indifférent à la justice et au simple bonheur des hommes, la science se consacre au meurtre organisé, personne sans doute, à moins d'idéalisme impénitent, ne songera à s'en étonner.
Les découvertes doivent être enregistrées, commentées selon ce qu'elles sont, annoncées au monde pour que l'homme ait une juste idée de son destin. Mais entourer ces terribles révélations d'une littérature pittoresque ou humoristique, c'est ce qui n'est pas supportable.
Déjà, on ne respirait pas facilement dans un monde torturé. Voici qu'une angoisse nouvelle nous est proposée, qui a toutes les chances d'être définitive. On offre sans doute à l'humanité sa dernière chance. Et ce peut-être après tout le prétexte d'une édition spéciale. Mais ce devrait être plus sûrement le sujet de quelques réflexions et de beaucoup de silence.
Au reste, il est d'autres raisons d'accueillir avec réserve le roman d'anticipation que les journaux nous proposent. Quand on voit le rédacteur diplomatique de l'Agence Reuter annoncer que cette invention rend caducs les traités ou périmées les décisions mêmes de Potsdam, remarquer qu'il est indifférent que les Russes soient à Koenigsberg ou la Turquie aux Dardanelles, on ne peut se défendre de supposer à ce beau concert des intentions assez étrangères au désintéressement scientifique.
Qu'on nous entende bien. Si les Japonais capitulent après la destruction d'Hiroshima et par l'effet de l'intimidation, nous nous en réjouirons. Mais nous nous refusons à tirer d'une aussi grave nouvelle autre chose que la décision de plaider plus énergiquement encore en faveur d'une véritable société internationale, où les grandes puissances n'auront pas de droits supérieurs aux petites et aux moyennes nations, où la guerre, fléau devenu définitif par le seul effet de l'intelligence humaine, ne dépendra plus des appétits ou des doctrines de tel ou tel État.
Devant les perspectives terrifiantes qui s'ouvrent à l'humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d'être mené. Ce n'est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l'ordre de choisir définitivement entre l'enfer et la raison".
Combat du 8 août 1945
Par Albert Camus
Mientras tanto, es lícito pensar que hay cierta indecencia en celebrar así un descubrimiento que se pone, primeramente, al servicio de la más formidable furia destructora de que el hombre haya dado pruebas desde siglos. Nadie, sin duda, a menos que sea un idealista impenitente, se asombrará de que, en un mundo entregado a todos los desgarramientos de la violencia, incapaz de ningún control, indiferente a la justicia y a la sencilla felicidad de los hombres, la ciencia se consagre al crimen organizado.
Estos descubrimientos deben ser registrados, comentados según lo que son, anunciados al mundo para que el hombre tenga una idea precisa de su destino. Pero rodear estas terribles revelaciones de una literatura pintoresca o humorística, no es soportable.
Ya se respiraba con dificultad en un mundo torturado. Y he aquí que se nos ofrece una nueva angustia, que tiene todas las posibilidades de ser definitiva. Sin duda se le brinda al hombre su última posibilidad. La bomba atómica puede servir, en rigor, para una edición especial. Pero debiera ser, con toda seguridad, motivo de algunas reflexiones y de mucho silencio.
Además, hay otras razones para acoger con reserva la novela de ciencia ficción que los diarios nos ofrecen. Cuando se ve al redactor diplomático de la Agencia Reuter anunciar que esta invención vuelve caducos los tratados e incluso las decisiones de Postdam, señalar que es indiferente que los rusos estén en Koenigsberg o los turcos en los Dardanelos, no se puede evitar atribuirle a tal concierto intenciones bastante ajenas al desinterés científico.
Entiéndase bien. Si los japoneses capitulan después de la destrucción de Hiroshima y por efectos de la intimación, nos alegramos. Pero nos rehusamos a sacar de tan grave noticia otra conclusión que no sea la decisión de abogar más enérgicamente aún en favor de una verdadera sociedad internacional, en la que las grandes potencias no tengan derechos superiores a los de las pequeñas y medianas naciones, en que la guerra, azote hecho definitivo por el solo efecto de la inteligencia humana, no dependa más de los apetitos o de las doctrinas de tal o cual estado.
Ante las perspectivas aterradoras que se abren a la humanidad, percibimos aún mejor que la paz es la única lucha que vale la pena entablar. No es ya un ruego, sino una orden que debe subir de los pueblos hacia los gobiernos, la orden de elegir definitivamente entre el infierno y la razón".
Combat, 8 de agosto de 1945
Por Albert Camus.
En attendant, il est permis de penser qu'il y a quelque indécence à célébrer ainsi une découverte, qui se met d'abord au service de la plus formidable rage de destruction dont l'homme ait fait preuve depuis des siècles. Que dans un monde livré à tous les déchirements de la violence, incapable d'aucun contrôle, indifférent à la justice et au simple bonheur des hommes, la science se consacre au meurtre organisé, personne sans doute, à moins d'idéalisme impénitent, ne songera à s'en étonner.
Les découvertes doivent être enregistrées, commentées selon ce qu'elles sont, annoncées au monde pour que l'homme ait une juste idée de son destin. Mais entourer ces terribles révélations d'une littérature pittoresque ou humoristique, c'est ce qui n'est pas supportable.
Déjà, on ne respirait pas facilement dans un monde torturé. Voici qu'une angoisse nouvelle nous est proposée, qui a toutes les chances d'être définitive. On offre sans doute à l'humanité sa dernière chance. Et ce peut-être après tout le prétexte d'une édition spéciale. Mais ce devrait être plus sûrement le sujet de quelques réflexions et de beaucoup de silence.
Au reste, il est d'autres raisons d'accueillir avec réserve le roman d'anticipation que les journaux nous proposent. Quand on voit le rédacteur diplomatique de l'Agence Reuter annoncer que cette invention rend caducs les traités ou périmées les décisions mêmes de Potsdam, remarquer qu'il est indifférent que les Russes soient à Koenigsberg ou la Turquie aux Dardanelles, on ne peut se défendre de supposer à ce beau concert des intentions assez étrangères au désintéressement scientifique.
Qu'on nous entende bien. Si les Japonais capitulent après la destruction d'Hiroshima et par l'effet de l'intimidation, nous nous en réjouirons. Mais nous nous refusons à tirer d'une aussi grave nouvelle autre chose que la décision de plaider plus énergiquement encore en faveur d'une véritable société internationale, où les grandes puissances n'auront pas de droits supérieurs aux petites et aux moyennes nations, où la guerre, fléau devenu définitif par le seul effet de l'intelligence humaine, ne dépendra plus des appétits ou des doctrines de tel ou tel État.
Devant les perspectives terrifiantes qui s'ouvrent à l'humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d'être mené. Ce n'est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l'ordre de choisir définitivement entre l'enfer et la raison".
Combat du 8 août 1945
Par Albert Camus
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"El mundo es lo que es, es decir, poca cosa. Es lo que desde ayer todos sabemos gracias al formidable concierto que la radio, los diarios y las agencias noticiosas acaban de desencadenar con respecto a la bomba atómica. En efecto, nos enteramos, en medio de una multitud de comentarios entusiastas, que cualquier ciudad de mediana importancia puede ser totalmente arrasada por una bomba del tamaño de una pelota de fútbol. Los diarios norteamericanos, ingleses y franceses se extienden en elegantes disertaciones sobre el porvenir, el pasado, los inventores, el costo, la vocación pacífica y los efectos bélicos, las consecuencias políticas y aun la índole independiente de la bomba atómica. En resumen, la civilización mecánica acaba de alcanzar su último grado de salvajismo. Será preciso elegir en un futuro más o menos cercano entre el suicidio colectivo o la utilización inteligente de las conquistas científicas.Mientras tanto, es lícito pensar que hay cierta indecencia en celebrar así un descubrimiento que se pone, primeramente, al servicio de la más formidable furia destructora de que el hombre haya dado pruebas desde siglos. Nadie, sin duda, a menos que sea un idealista impenitente, se asombrará de que, en un mundo entregado a todos los desgarramientos de la violencia, incapaz de ningún control, indiferente a la justicia y a la sencilla felicidad de los hombres, la ciencia se consagre al crimen organizado.
Estos descubrimientos deben ser registrados, comentados según lo que son, anunciados al mundo para que el hombre tenga una idea precisa de su destino. Pero rodear estas terribles revelaciones de una literatura pintoresca o humorística, no es soportable.
Ya se respiraba con dificultad en un mundo torturado. Y he aquí que se nos ofrece una nueva angustia, que tiene todas las posibilidades de ser definitiva. Sin duda se le brinda al hombre su última posibilidad. La bomba atómica puede servir, en rigor, para una edición especial. Pero debiera ser, con toda seguridad, motivo de algunas reflexiones y de mucho silencio.
Además, hay otras razones para acoger con reserva la novela de ciencia ficción que los diarios nos ofrecen. Cuando se ve al redactor diplomático de la Agencia Reuter anunciar que esta invención vuelve caducos los tratados e incluso las decisiones de Postdam, señalar que es indiferente que los rusos estén en Koenigsberg o los turcos en los Dardanelos, no se puede evitar atribuirle a tal concierto intenciones bastante ajenas al desinterés científico.
Entiéndase bien. Si los japoneses capitulan después de la destrucción de Hiroshima y por efectos de la intimación, nos alegramos. Pero nos rehusamos a sacar de tan grave noticia otra conclusión que no sea la decisión de abogar más enérgicamente aún en favor de una verdadera sociedad internacional, en la que las grandes potencias no tengan derechos superiores a los de las pequeñas y medianas naciones, en que la guerra, azote hecho definitivo por el solo efecto de la inteligencia humana, no dependa más de los apetitos o de las doctrinas de tal o cual estado.
Ante las perspectivas aterradoras que se abren a la humanidad, percibimos aún mejor que la paz es la única lucha que vale la pena entablar. No es ya un ruego, sino una orden que debe subir de los pueblos hacia los gobiernos, la orden de elegir definitivamente entre el infierno y la razón".
Combat, 8 de agosto de 1945
Por Albert Camus.
Por cierto, hoy hace cinco años que murió el gran historiador estadounidense de origen británico, Tony Judt. Sirva también esta entrada de homenaje a su memoria. Y ahora, como decía Sócrates, "Ιωμεν", nos vamos. Sean felices, por favor. Tamaragua, amigos. HArendt
1 comentario:
Gran artículo...
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